CONTRATS PUBLICS N° 190 - Septembre 2018
Article de Ghislain Minaire.
Extrait : « Dans le cadre du recours Tarn-et-Garonne, le préfet fait partie des requérants dits « privilégiés » en ce qu’il n’a pas à démontrer un intérêt lésé à la différence des tiers. Cependant, dans un arrêt du 13 mars dernier, la CAA de Paris précise que le tiers peut intervenir volontairement à l’instance du préfet dirigé contre un contrat. Quelles sont les conséquences d’une telle solution ?
Près d’un siècle après avoir posé la question de la place du tiers par rapport au contrat administratif et l’avoir exclu du prétoire du juge du contrat précisément en raison de cette qualité d’étranger aux relations contractuelles(1), et après des percées conceptuelles initiées par la création du recours Tropic(2), le Conseil d’État a procédé à une remarquable unification du contentieux contractuel par sa décision Département de Tarn-et-Garonne(3) . Tous les tiers – et non plus seulement les candidats évincés – y tiennent désormais une place. Ils peuvent saisir le juge du plein contentieux d’un recours en contestation de la validité du contrat. Cette unification s’est toutefois accompagnée de conditions strictes quant à la recevabilité du recours et à l’opérance des moyens que le tiers peut invoquer. Ce dernier doit ainsi être « lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses » et ne peut utilement invoquer que des « vices en rapport direct avec l’intérêt lésé dont il se prévaut ou ceux d’une gravité telle que le juge devrait les relever d’office ». En dépit de l’ouverture formelle du contentieux, la volonté (louable) de préserver la stabilité des relations contractuelles, qui a servi de contrepoids à la « révolution »(4) du recours Tarn-et-Garonne, interroge aujourd’hui quant à l’éviction matérielle des tiers(5) . Le bilan jurisprudentiel des quatre années d’application de ce nouveau recours conduit à une appréciation nuancée en ce qui les concerne. »