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TRIBUNE

Pour un septennat présidentiel non renouvelable

S’il est difficile pour un Président de se faire réélire pour poursuivre son action, ne faudrait-il pas en tirer les conséquences institutionnelles ?
par Serge Pugeault, Professeur de droit public à l’université de Reims, directeur du Centre de Recherche Droit et Territoire
publié le 10 décembre 2016 à 9h02

L'annonce, surprise, par François Hollande de ne pas être candidat à un second mandat présidentiel a été abondamment commentée, notamment sur le thème : pour la première fois sous la Ve République un Président en exercice renonce à briguer un second mandat. A la réflexion, faut-il pourtant être étonné par cette annonce ? Certes les autres présidents en exercice sous la Ve République se sont représentés. Mais dans quel contexte et pour quel résultat ?

La candidature du général de Gaulle en 1965 était en réalité sa première tentative d’élection au suffrage universel direct, après la révision constitutionnelle de 1962, et son mandat s’est terminé de façon prématurée par sa démission en 1969. Le second mandat de François Mitterrand faisait suite à une période de cohabitation de deux ans (1986-1988) qui avait transféré une grande part de la responsabilité du pouvoir sur son Premier ministre. Le même scénario s’est reproduit pour Jacques Chirac : s’il a été candidat et réélu en 2002, c’est après une période de cohabitation de cinq ans avec Lionel Jospin, de sorte que Jacques Chirac n’a exercé la réalité du pouvoir pendant son premier mandat que pendant deux ans. Sa réélection est en outre intervenue dans le contexte particulier de la présence de Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle, alors que son score du premier tour avait été faible. Georges Pompidou est mort avant d’avoir terminé son mandat. Valéry Giscard d’Estaing s’est représenté en 1981 et a été battu. Nicolas Sarkozy s’est représenté en 2012 et a été battu…

Les présidents qui ont été réélus l’ont donc été à chaque fois dans des contextes particuliers : dans deux cas après une période de cohabitation, dans un cas, celui du général de Gaulle, à l’occasion de la première élection au suffrage universel direct, et dans ce cas pour un mandat interrompu au bout de quatre ans. Hors contexte particulier, septennat ou quinquennat, les deux présidents qui se sont représentés ont été battus…

Ne pas se préoccuper de sa réélection

La décision de François Hollande relève donc d'une grande lucidité sur ce qu'étaient ses chances effectives d'être réélu, a fortiori du fait de la contrainte nouvelle pour un président sortant de se soumettre à des primaires alors même que son mandat n'est pas achevé. Ce que dit l'histoire de la Ve République, depuis 1958, c'est en réalité que les pouvoirs importants du Président, hors cohabitation, l'exposent en permanence et sur tous les dossiers et finissent paradoxalement par user politiquement celui qui les exerce.

S’il est donc difficile pour un Président de se faire réélire pour poursuivre son action, et donc par sagesse d’être candidat pour un second mandat, ne faudrait-il pas en tirer les conséquences sur le plan institutionnel ? Un mandat unique aurait un double avantage pour un Président. Il lui permettrait de mener son action sans se préoccuper des conditions de sa réélection, autrement dit d’agir dans l’intérêt exclusif du pays. Il lui éviterait de devoir se soumettre au terme de son mandat à une procédure de primaires incompatible avec son statut présidentiel au moment où elle se déroule.

Parce qu’une durée de cinq ans serait trop courte pour un mandat unique, un septennat non renouvelable offrirait un compromis raisonnable.

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